12/ Arts et sciences du Moyen Âge au 18e siècle

Le Moyen-Age (5e au 14e siècle)

Introduction

Au Moyen-Âge, la vie intellectuelle et artistique offre un caractère nettement international, en termes de langue parlée (partout, la langue cultivée est le latin), de thèmes d’inspiration, de styles architecturaux…

Architecture

Les périodes mérovingiennes (5e au 8e) et carolingiennes (8e au 10e)

Il ne reste que quelques traces archéologiques de la période mérovingienne, rien de plus. L’architecture de cette époque représente un certain recul par rapport aux époques antérieures.

A l’époque carolingienne, par contre, on voit réapparaître un art monumental et figuratif. Les bâtisseurs appliquent le programme architectural hérité des Romains et intègrent, dans les édifices religieux, le plan basilical {Plan d’église qui se développe en longueur}. L’usage du transept {Nef transversale d’une église catholique formant une croix avec la nef principale (qui est la partie de l’église qui s’étend du portail jusqu’au chœur)} est généralisé, une abside {Extrémité d’une église, formée par un demi-cercle et située derrière le chœur} est présente de même qu’une crypte sous le chœur {Partie de l’église où se déroulent les cérémonies autour de l’autel et où se tiennent le clergé et les chantres qui participent à la célébration liturgique}. Par ailleurs, un accent est mis sur les tours.

L’architecture carolingienne va annoncer l’art roman.

L’art roman (11e-12e siècles)

L’art roman naît en France au 11e siècle et va ensuite s’étendre à d’autres pays européens. Il s’agit d’un art monastique et rural qui va marquer l’éveil de l’art occidental. Les conditions matérielles, économiques et sociales de l’époque vont permettre son épanouissement.

Les abbayes constituent un élément moteur de première importance et symbolisent la puissance et le rayonnement de l’Église au Moyen-Age. Le développement de la chrétienté se marque par la floraison des pèlerinages. Ce culte des reliques {Restes du corps d’un saint ou d’un martyr et qui est l’objet d’une grande vénération} s’est développé dans un but économique. Il procure des ressources aux abbayes qui deviennent des organismes puissants au sein des États.

Un grand nombre d’édifices religieux vont être construits à cette époque. C’est à partir de cette période que le plan des églises va être fixé: ce sera celui de la croix latine (symbole de la crucifixion de Jésus-Christ). Le chœur, qui est la partie essentielle de l’église, est de forme arrondie et tourné vers l’est, c’est à dire en direction de Jérusalem. C’est là que se tient le clergé qui célèbre le culte et les chantres {Personnes qui chantent dans les services religieux} qui chantent l’office. Sous le chœur, une chapelle est aménagée pour la vénération des reliques: la crypte. Dans les grandes églises de pèlerinage, au-dessus des bas-côtés, des tribunes constituent des espaces complémentaires pour accueillir les foules. Contrairement au passé, la couverture de la toiture est dorénavant en pierre (et non plus constituée d’un plafond plat en bois).

Les bâtisseurs vont s’inspirer des techniques de constructions utilisées par les Romains et maintenues à l’époque des Mérovingiens et les Carolingiens.

L’église romane se caractérise notamment par l’usage de la “voûte en berceau (voûte qui se présente comme un demi-cylindre), un aspect trapu et des volumes géométriques simples. La pression exercée par l’usage de la voûte en berceau nécessite, notamment, la construction de murs épais, presque aveugles.

Bien que l’architecture romane présente des caractères communs, elle varie cependant en fonction des régions et des influences qui s’y sont développées.

Dans les régions qui vont constituer la Belgique actuelle, on distingue 2 groupes: celui de la vallée de la Meuse (le groupe mosan) et celui de la Vallée de l’Escaut (le groupe scaldien).

Les églises du groupe mosan sont de dimensions plus modestes qu’en France, moins évoluées dans les recherches de voûtes et influencées par l’art carolingien. Elles se caractérisent notamment par une tour occidentale massive (le westbau), la présence d’un transept bas et peu saillant, l’absence de déambulatoire {Galerie qui fait le tour du chœur d’une église} ainsi qu’une élévation à 2 étages.

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Comme exemples de ce type d’églises, on peut citer la Collégiale Ste-Gertrude de Nivelles (11e-12e siècle), l’Église St-Hadelin de Celles (11e siècle), l’église Notre-Dame de Hastière-par-delà (11e siècle) et l’Église St-Barthélémy de Liège (12e siècle).

Les églises du groupe scaldien ont, quant à elles, subi une influence normande. Peu d’entre elles ont été conservées. Elles se caractérisent notamment par l’usage de la pierre calcaire bleue de Tournai, par la présence de deux tours en façade, d’une “tour lanterne” à la croisée des transepts, par une élévation à 3 ou 4 étages et par la présence d’un déambulatoire.

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L’exemple le plus emblématique de ce style est la cathédrale de Tournai (12e siècle). On peut également citer la Collégiale St-Vincent de Soignies (qui est à la limite des influences des régions scaldienne et mosane).

L’art gothique

L’art gothique apparaît en Ile de France (région parisienne) au milieu du 12e siècle et va se développer pendant 4 siècles jusqu’à la Renaissance. Il s’agit essentiellement d’un art urbain, d’un art du nord de la France lié au développement du pouvoir royal. C’est l’art des cathédrales. Il va progressivement s’étendre à d’autres régions d’Europe (au cours des 13e et 14e siècles).

Étroitement liée à l’essor des villes (qui deviennent les centres privilégiés de la vie économique, spirituelle et artistique), la cathédrale gothique en est le symbole même. Sa construction associe l’évêque à des riches laïcs {Personnes qui n’appartiennent pas au clergé} dans la mesure où elle nécessite un effort financier important. Enfin, la cathédrale n’est pas seulement un lieu de culte, elle accueille également les fêtes solennelles et les premiers “mystères“, sorte de théâtre religieux (voir infra rubrique littérature).

L’architecture gothique se caractérise notamment par l’usage de “l’arc brisé” et la “voûte sur croisée d’ogives” (construite sur une armature faite de 2 arcs qui se croisent en X) à l’intérieur et de “l’arc boutant{Pilier qui se termine en demi-cercle et qui permet de soutenir un mur ou une voûte de l’extérieur}, à l’extérieur, destiné à recevoir la poussée des voûtes. L’usage de ces techniques va permettre aux bâtisseurs de construire des édifices de plus en plus grands et de plus en plus clairs.

Le 13e siècle est l’âge d’or de l’art gothique. La lumière colorée par les grands vitraux illumine l’intérieur de la cathédrale.

Les régions qui vont constituer la Belgique actuelle vont mettre longtemps à abandonner le style roman et ne vont que lentement adopter les formes nouvelles de l’architecture gothique.

Parmi les premières manifestations de l’architecture gothique qu’on va y voir, il y a tout d’abord le gothique cistercien (fin 12e siècle et début 13e siècle). Les premiers édifices dans ce style seront des abbatiales cisterciennes construites par des moines français venant de Bourgogne. Ce sera notamment le cas de l’abbaye de Villers la Ville.

Il y aura également le gothique scaldien (c’est à dire de la vallée de l’Escaut, région englobée pour la plus grosse partie dans le Comté de Flandre) qui va se développer dans la première moitié du 13e siècle. C’est à Tournai, ville du Domaine Royal français et toute proche des foyers gothiques français, que va apparaître la première manifestation du style gothique scaldien. Parmi les caractéristiques de ces églises, il y a notamment l’utilisation de la pierre calcaire bleue du Tournaisis, l’usage de chapiteaux {Partie sculptée située au-dessus d’un pilier ou d’une colonne} à crochets, une tour lanterne à la croisée des transepts ainsi que des tourelles accolées à la façade ouest et aux façades des transepts.

Parmi les réalisations de ce gothique scaldien, on peut citer différentes églises à Tournai (St-Quentin, St-Nicolas et St-Jacques), ainsi que l’église St-Nicolas à Gand et l’église Notre-Dame de Pamele à Audenaerde.

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Mais ce gothique scaldien ne se définit pas que sur le plan de l’architecture religieuse. Il existe aussi un gothique scaldien civil.

Comme exemples, on peut citer le premier beffroi {Tour de ville, dans laquelle on plaçait des gardes pour surveiller la campagne, et une cloche qui servait à donner l’alarme et à rythmer le temps de la vie sociale. Par ailleurs, le beffroi offrait un abri sûr pour le sceau, la Charte et autres documents et biens précieux de la commune. La tour symbolisait une certaine valeur: la liberté de la commune et l’affirmation du pouvoir échevinal. (voir fiche “Histoire avant l’indépendance“)} de Belgique qui va être construit à Tournai vers 1200 et le plus ancien hôtel de ville de Belgique, celui d’Alost, construit vers 1220.

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On va également voir se développer le gothique de la Flandre maritime, région où les abbayes vont avoir un rôle très important (elles vont être à l’origine de la construction de digues destinées à lutter contre l’invasion des polders {Étendue de terre conquise sur la mer grâce à des digues et dont le niveau est inférieur à celui de la mer. Les polders sont réalisés par drainage provoquant l’assèchement des zones littorales} par la mer, de l’assèchement des terres et du défrichement). Ce style se caractérise par l’usage de la brique, matériau caractéristique de la région mais aussi par le fait que les 3 nefs sont de même hauteur (on parle de “hallenkirche) et la présence d’une tour trapue dotée de puissants contreforts {Pilier servant d’appui et de renfort à un mur}.

Parmi les exemples illustrant cette architecture, on peut citer l’église Notre-Dame à Damme et l’église Notre-Dame à Bruges.

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Dans la seconde moitié du 13e siècle, les formes du gothique classique français vont graduellement faire leur apparition et dominer, pendant un siècle, la production architecturale dans les régions qui vont constituer la Belgique actuelle. L’arrivée du gothique brabançon, au cours de la 2e moitié du 14e siècle, va toutefois mettre un terme à cette influence française.

C’est à Malines, dans le chœur de la cathédrale St-Rombaut, que l’on va voir apparaître, en 1340, les caractéristiques du gothique brabançon. Parmi celles-ci, on pointera l’usage de colonnes rondes avec chapiteaux ornés de deux rangées de feuilles de chou (et plus tard, le pilier mouluré sans chapiteau), une élévation à 2 étages (le triforium {Le triforium est un passage étroit aménagé dans l’épaisseur des murs au niveau des combles sur les bas-côtés de la nef d’une grande église. Il n’a pas de vocation liturgique mais, comme il permet le passage d’un homme, il facilite l’entretien des parties hautes de l’édifice} étant réduit à un mur non fonctionnel) et la couverture de toutes les chapelles se trouvant le long des nefs latérales par de petites toitures séparées les unes des autres, de sorte qu’à l’extérieur, les façades latérales présentent une succession de petits toits ornés de statues.

Comme exemples, on peut citer l’église St-Pierre à Louvain et l’église Notre-Dame du Sablon à Bruxelles.

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Au cours du 14e siècle, l’architecture gothique civile va, elle aussi, continuer à se développer dans les Flandres comme le montrent notamment les Halles {Marchés couverts} et le beffroi de Bruges (1376).

L’architecture militaire médiévale

Pendant plusieurs siècles (du 4e au 9e siècle), les systèmes de défense vont être faits de terre et de bois.

Au 10e siècle, on va voir l’apparition du château à donjon qui se caractérise par une haute tour englobée dans une enceinte formant “basse-cour”. Toutefois, c’est toujours la terre et le bois qui sont utilisés.

Au milieu du 11e siècle, une transformation fondamentale de l’architecture militaire va s’opérer avec l’introduction de l’usage de la pierre qui va progressivement se généraliser.

Par ailleurs, à partir de la fin du 12e siècle, l’architecture militaire va subir une double influence: celle que les Croisés ont vue en Orient (le château des Comtes de Flandre à Gand en est un bel exemple) et celle venue de France (où Philippe-Auguste met en place un système défensif homogène grâce à un corps d’ingénieurs militaires).

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Peinture

Tout au long du Moyen-Age, l’art de l’enluminure (appelé aussi l’art de “la miniature”) va être cultivé dans les abbayes. Par “enluminure“, on entend la décoration partielle ou totale d’une page de manuscrit. Il s’agit donc d’ajouter une image à un texte.

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La Gaule franque {Voir fiche “Histoire avant l’indépendance“rubrique “antiquité”} va constituer un des principaux centres où l’art de l’enluminure va se développer. Il se caractérise, au départ, par l’usage de motifs végétaux et animaux qui s’intègrent à des motifs architecturaux. La couleur est un peu acidulée.

L’arrivée au pouvoir de la dynastie carolingienne (751-888) va modifier les conditions générales du développement de cet art. En effet, les scriptoria {Ateliers dans lesquels les copistes réalisaient des livres copiés manuellement, avant l’introduction de l’imprimerie en Occident}, monastiques ou épiscopaux, vont désormais travailler pour le souverain ou son entourage proche, voire se faire directement intégrer à la Cour.

A partir du règne de Charlemagne, les souverains vont commencer à passer commande de manuscrits enluminés {Ce qui précède est extrait de: Garzanti (collectif), Encyclopédie de l’Art, éd. Le Livre de Poche, 1991, p. 340-342}.

Sculpture et autres arts

La sculpture romane

Les réalisations sont peu nombreuses à cette époque.

Outre les sculptures intégrées à l’architecture des églises (au niveau du portail, des colonnes…), une autre production courante est la cuve baptismale {Cuve posée sur un socle, destinée à contenir ou recevoir l’eau utilisée lors du baptême}. A cela s’ajoutent des sculptures sur bois ayant pour thèmes principaux “la Vierge assise à l’enfant” (Sedes Sapientiae) et le Christ.

Par ailleurs, l’art roman est le moment par excellence de l’orfèvrerie {Fabrication d’objets d’ornements en métaux précieux (cuivre, étain, argent, or…)}. Elle a particulièrement brillé dans la Vallée de la Meuse, en même temps que l’art de “la dinanderie” dont le développement sera extraordinaire à partir du 12e siècle.

La dinanderie désigne les nombreux objets en cuivre, en laiton ou en bronze, à usage religieux ou domestique, produits à Dinant ou dans ses environs. Par la suite, ce terme sera utilisé pour parler de la sculpture du métal, de façon générale.

Parmi les exemples les plus marquants de cet art de la dinanderie, on peut pointer les fonts baptismaux (1107-1118) de l’Eglise St-Barthélémy de Liège, réalisés par Renier de Huy et le Chef reliquaire{Reliquaire appelé ainsi car il contiendrait un os de la tête du Pape Alexandre} du Pape Alexandre (1145) conservé aux Musées Royaux d’Art et d’Histoire (MRAH) du Cinquantenaire {Musée Art & Histoire}, à Bruxelles (musée qui abrite une très belle collection de dinanderie).

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La sculpture gothique

Tout comme pour l’architecture, la sculpture sur pierre qui va se développer va être influencée par la France. Toutefois, dans la sculpture sur bois, l’influence va être moins perceptible.

De façon générale, on va voir une évolution entre les périodes romane et gothique dans le traitement des figures sculptées sur bois. Aux statues raides et en position frontale de l’époque romane, on va voir succéder, à l’époque gothique, des statues laissant exprimer les sentiments des sujets représentés. Ainsi, par exemple, dans le cas des statues ayant pour thème la “Vierge à l’enfant”, on va voir une place de plus en plus grande être laissée à l’expression des émotions et une facture de plus en plus réaliste.

Tout comme pour la sculpture, l’art du métal va lui aussi être soumis à l’architecture. Les reliquaires vont devenir des églises gothiques en miniature. Comme exemple, on peut citer la châsse {Coffre où sont conservées les reliques d’un saint} de St-Eleuthère à la cathédrale de Tournai.

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L’art du vitrail

Le vitrail {Panneau formé de verres colorés ou peints liés entre eux par du plomb. Un mètre carré de fenêtre assemble souvent plus de 400 morceaux de verre coloré de 2 à 6 milimètres d’épaisseur} va connaître un développement du fait de l’augmentation en nombre et en surface des fenêtres dans les églises et par la création des rosaces {Grands vitraux circulaires}. Il va prendre une extension considérable au 13e siècle.

Littérature

Parmi les écrits du Moyen-Age, il convient de pointer les récits à caractère historique. Rédigés d’abord en latin, ces récits vont progressivement (à partir du 13e siècle) être écrits en français et en thiois.

Dans les œuvres rédigées en latin, on peut retenir celles de Sigebert de Gembloux (1030-1112) qui sera l’historien le plus illustre de son temps.

Pour ce qui est des œuvres écrites en français, on peut retenir celles de Jean Froissart (1337-1410), chanoine de Chimay, grand voyageur qui va retracer dans ses chroniques {Recueils de faits historiques rédigés en respectant un ordre chronologique (et dont les auteurs sont au moins pour partie, contemporains)}, composées au jour le jour, l’histoire occidentale à l’époque de la guerre des Cent Ans {La guerre de Cent Ans couvre une période de cent seize ans (de 1337 à 1453) pendant laquelle s’affrontent sur le sol français deux dynasties, les Plantagenêts et la Maison capétienne de Valois, lors de nombreux conflits, entrecoupés de trêves plus ou moins longues} et qui va ouvrir la voie aux grands chroniqueurs bourguignons du 15e siècle (voir infra).

Pour ce qui est des œuvres rédigées en thiois {le terme “thiois” était, et est encore, utilisé pour qualifier les parlers limbourgeois, flamand, etc à l’époque des anciens Pays-Bas}, on peut retenir le nom de Jacob Van Maerlant (1235-1299) de Damme, auteur de “Der Naturen Bloeme” qui est un résumé de ses connaissances zoologiques et botaniques, “Rijmbijbel” qui traite de l’histoire sacrée et “Spieghel historiael”, adaptation thioise d’une Chronique universelle {La Chronique universelle est née de la volonté d’introduire l’histoire sacrée, celle du peuple juif, d’après l’Ancien Testament, et celle de l’Église, dans l’histoire du monde, en établissant des synchronismes entre les chronologies des États de l’Antiquité avec celle de la Bible et du christianisme}. De façon générale, la littérature d’inspiration religieuse va trouver, dans les régions de parler thiois, une terre d’élection. Ainsi, la poésie mystique va briller avec les chants de la Sœur Hadewych (13e siècle) et la prose mystique va atteindre son sommet avec des écrits de Jan Van Ruysbroec (1294-1381), chapelain {prêtre} de la cathédrale Saint Michel à Bruxelles.

Presque toutes les grandes abbayes (Stavelot, Lobbes, Saint-Trond…) vont former au 12e et au 13e siècles des recueils de légendes et de vies de Saints {Ce qui suit est extrait de Liebrecht (H), Rency (G), Histoire illustrée de la Littérature belge de langue française, éd. Vanderlinden, 1926}. Ces recueils vont fréquemment être utilisés par les trouvères {Poètes et chanteurs au Moyen-Âge}, gens lettrés. Ils vont les intégrer dans leurs “chansons de geste“, récits qui comportent plusieurs milliers de vers et qui étaient des romans de chevalerie à caractère épique. C’est ainsi que l’on va voir se former en Lotharingie, autour de l’abbaye de Stavelot-Malmédy, la légende des “Enfances de Charlemagne” et celle de “l’Histoire de Charles Martel”. Parmi ces trouvères, on peut citer le nom de Adenet le Roi, surnommé le “Roi des ménestrels“, né dans le Duché de Brabant vers 1240. Il va vivre très jeune à la Cour du Duc de Brabant (Henri III de Brabant), prince cultivé et poète à ses heures. Adenet va passer, ensuite, au service du Comte de Flandre (Gui de Flandre) et l’accompagner en Italie et en France.

A côté des chansons de geste, composées pour des auditoires nombreux réunis dans les champs de foire ou autour des parvis d’église aux jours de grands pèlerinages ou dans les salles de festins des châteaux et qui étaient chantés avec des accompagnements de vielle {Instrument de musique à cordes dont on joue au moyen d’une manivelle à roue et de touches}, il existe une littérature destinée à des publics plus restreints. Dans les châteaux, on écoutait volontiers la lecture à haute voix de “romans courtois“. Ils empruntent leur matière et leurs héros à l’Antiquité ou encore au monde idéalisé de la chevalerie. Dans ce cadre, on peut citer notamment le nom de Gauthier de Tournai (+/- 1230).

On va également trouver des œuvres relevant de “la poésie lyrique courtoise” (genre né dans le sud de la France au 11e siècle.) qui va se développer dans les provinces des anciens Pays-Bas à partir du 12e siècle. L’amour va en être le thème essentiel. L’amour auquel il est fait référence est presque toujours illégitime et met en scène une femme de la noblesse qui occupe toujours une position sociale supérieure à l’homme qui l’aime. L’amant doit y avoir toutes les vertus: généreux, brave, patient et discret. Il doit connaître les règles subtiles de l’art d’aimer qui est la source de toutes les perfections et qui lui enseigne la beauté du sacrifice. Parmi les poètes courtois, on peut citer Henri III, duc de Brabant.

Mais, à côté de ces œuvres, on trouve également des œuvres satiriques, comme la transposition et l’adaptation du “Roman de Renard” {Recueils de récits médiévaux en vieux français des 12e et 13e siècles, qui sont écrits en vers et qui font la satire des comportements humains en se servant d’animaux. Le monde animal représente la société du Moyen Âge}, en thiois, par différents poètes, dont Arnold, bourgeois qui va s’écarter du poème français pour s’attaquer plus directement à la noblesse féodale, à la royauté, à l’Église et à toutes les contraintes et les iniquités dont souffre le peuple.

On peut également ajouter à ce qui précède, un autre genre littéraire, “le fabliau” c’est à dire, à l’origine, un “conte à rire”. Nombre d’entre eux tournent en ridicule leurs personnages, toutes classes sociales confondues. Leurs récits sont brefs, railleurs et même, dans certains cas, obscènes. Ils sont surtout le fait de jongleurs de profession. Mais, à partir du 14e siècle {Époque à laquelle les jongleurs nomades disparaissent peu à peu au profit de jongleurs attachés à une Cour qui deviennent ainsi des ménestrels attitrés}, la poésie des fabliaux va devenir moralisante, prétentieuse et allégorique.

Enfin, c’est de cette époque que date l’origine du théâtre. Celui-ci a des origines religieuses. Il s’agit de mimer des scènes racontées dans la Bible. La scène, au départ placée dans l’église, va être déplacée à l’extérieur de celle-ci, l’église étant devenue trop petite vu la foule de personnes qui désirent assister à la représentation. Les fêtes de Noël et de Pâques sont à l’origine de ces spectacles que l’on va appeler, à partie du 14e siècle, des “Mystères“. Les “mystères” français vont progressivement se répandre dans les anciens Pays-Bas. Ils vont être traduits en thiois puis imités. On va les jouer dans les villes et même dans les villages.

Musique

La musique fait partie de l’enseignement donné dans les écoles épiscopales et abbatiales {Le système éducatif médiéval est fondé sur le savoir religieux, enseigné au sein d’abbayes ou d’écoles épiscopales (dites aussi “écoles cathédrales”). La vocation initiale de ces écoles étaient de former le clergé (prêtres…). Ces écoles ont été à la base de la renaissance culturelle et philosophique du 12e siècle et ont précédé la fondation des universités}. On y apprend l’art du “plain-chant {Plat, uni, égal. Sans modulation harmonique} grégorien{Le chant grégorien est le chant liturgique officiel de l’Église catholique romaine. Il est un chant sacré anonyme, habituellement interprété par un chœur ou par un soliste appelé chantre. Il est destiné à soutenir le texte liturgique en latin. C’est une musique récitative, qui prend son origine dans le texte, et qui favorise l’intériorisation et la conscience des paroles chantées}. Il s’agit d’un chant religieux monodique {C’est à dire à une seule voix. Toutes les voix chantent “à l’unisson”} composé sur des textes latins. Il est chanté sans accompagnement instrumental.

Toutefois, à côté de cette musique monodique va apparaître la “polyphonie à contrepoint” {La polyphonie est une combinaison de plusieurs voix indépendantes et pourtant liées les unes aux autres par les lois de l’harmonie}. L’ensemble des voix, bien que chacune soit traitée de manière indépendante, va former un tout complet.

Le 15e siècle (les Pays-Bas bourguignons)

Introduction {Liebrecht (H), Rency (G), Histoire illustrée de la Littérature belge de langue française, éd. Vanderlinden, 1926, p.102-103}

La période bourguignonne marque dans l’histoire des anciens Pays-Bas une transformation totale des conditions historiques, économiques et intellectuelles. Au particularisme de chacune des principautés féodales se substitue un esprit centralisateur {Le territoire de la Belgique actuelle correspond pour partie aux anciens Pays-Bas du Sud. Ceux-ci ne comprennent cependant pas les Principautés de Liège et de Stavelot-Malmédy (qui ne seront englobées qu’à la fin du 18e siècle) et Tournai (qui sera rattaché en 1521)} qui crée une organisation politique unique et qui fait naître une vie de Cour, au milieu de laquelle les arts, les sciences et les lettres vont se développer dans des conditions nouvelles.

C’est donc à partir du 15e siècle, avec la création de l’Université de Louvain (1425) et la Cour brillante des Ducs de Bourgogne, que la vie intellectuelle et artistique va commencer à avoir des caractéristiques plus spécifiquement locales.

Le mécénat {Soutien financier apporté notamment à un artiste} va jouer un rôle considérable dans ce milieu opulent et raffiné. Lancé par les Ducs de Bourgogne, il va devenir également le fait de membres de la noblesse et de riches bourgeois qui vont se mettre, à leur tour, à soutenir les artistes, permettant ainsi à ces derniers de pouvoir réaliser leurs œuvres dans les meilleures conditions possibles. Les commandes vont affluer.

Architecture

Le gothique brabançon (voir supra) va réellement triompher après 1400. En effet, ce style architectural né dans le Duché de Brabant va progressivement s’étendre aux régions voisines comme le montrent les exemples de la collégiale Ste-Waudru de Mons, de l’église Ste-Walburge d’Audenaerde ou de la cathédrale St-Bavon à Gand.

Par ailleurs de nombreux monuments civils vont également être construits dans le style gothique. Parmi ceux-ci, on peut citer les Hôtels de Ville de Bruxelles, de Louvain et de Mons. De grands seigneurs vont également se faire élever des Hôtels particuliers, comme l’Hôtel Gruthuuse que l’on peut encore voir à Bruges de nos jours ou l’Hôtel de Clèves-Ravenstein que l’on peut voir à Bruxelles.

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Peinture

Les Primitifs flamands

Deux siècles vont cristalliser le génie de l’école flamande: le 15e siècle et le 17e siècle. Parmi les traits essentiels de cette école, on peut citer la “joie” de la couleur et le goût quasi sensuel de la matière picturale.

Le peintre est attaché au spectacle du monde. Il est observateur et proche d’une réalité qu’il transpose suivant sa foi et sa fougue.

L’œuvre d’art n’a pour but que de louer Dieu et de se concilier les bonnes grâces de son église. Le récit du peintre se conforme à la littérature religieuse et la notation précise du réel se double d’un profond sens mystique.

Descendants d’une lignée de miniaturistes, les peintres du 15e siècle, que l’on va appeler les “Primitifs flamands“, restent pénétrés des lois de l’enluminure. Plusieurs années leur sont nécessaires pour terminer un retable.

Ces peintres, qui par ailleurs ne sont pas tous originaires des anciens Pays-Bas, ont été appelés “Primitifs” car ils ont été les premiers à affranchir la peinture du cadre mural (les fresques) ou livresque (les enluminures) et ont été les premiers à faire des tableaux de chevalet.

Leurs caractéristiques communes sont les suivantes: amour de la couleur, faible intérêt pour le corps humain, analyse des visages, peintures documentaires.

Jean Van Eyck (+/-1380-1441)

Jean Van Eyck va être le premier de ceux-ci. C’est lui qui va établir les bases techniques, formelles et spirituelles auxquelles la plupart des artistes de son temps vont être redevables.

Du point de vue technique, il va soigneusement préparer les panneaux de chêne (destinés à servir de support à sa peinture) en y étendant un mélange très blanc de colle et de chaux qu’il rend lisse. Les couleurs (pures et sans mélange) étalées en couches minces sur un tel fond sont traversées par la lumière réfléchie par la préparation blanche. C’est de cette technique que les œuvres tirent leur luminosité. Les matières colorantes utilisées sont pures et solides et de préférence d’origine minérale.

D’un point de vue formel, il donne aux objets, aux plantes, aux animaux et aux êtres humains une réelle valeur plastique, une matérialité tangible.

D’un point de vue spirituel, ce “psychologue” discret mais “impitoyable” est un croyant convaincu peignant des scènes bibliques et religieuses.

Avant son arrivée à la Cour du Duc de Bourgogne, Philippe le Bon (en 1425), il avait déjà produit quelques chefs d’œuvres à Liège dont Jean de Bavière, son premier mécène, était à l’époque le Prince-Evêque.

Van Eyck va commencer à signer et dater ses œuvres à partir de 1432. Entre cette date et 1439, 9 œuvres vont être répertoriées dont 4 se trouvent en Belgique.

Parmi ses œuvres, la plus grandiose est sans contexte le polyptique {Peinture réalisée sur plusieurs pans qui sont mobiles ou non} de l’Adoration de l’agneau mystique (+/- 1417-1432) {Il semblerait que son frère, Hubert, l’ait conçu et partiellement exécuté, arrêté par la mort} que l’on peut admirer dans la cathédrale St-Bavon à Gand. On peut également admirer 2 de ses œuvres au Musée Groeninghe de Bruges {MUSEA BRUGGE –icon map-maker Dijver 12 – B-8000 Bruges –icon website MUSEA BRUGGE} et 2 autres au Musée des Beaux Arts d’Anvers.

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Roger Van der Weyden (1400-1464)

Un autre de ces Primitifs flamands va être Roger de la Pasture, dit Roger Van der Weyden , peintre originaire de Tournai (qui voyagera en Italie en 1450). Parmi ses caractéristiques, on peut citer son attirance pour l’étude du cœur humain en proie à la souffrance. C’est ainsi qu’il va se concentrer sur les épisodes du drame de la “Passion du Christ {Ensemble des souffrances et supplices qui ont précédé et accompagné la mort de Jésus de Nazareth dit le Christ}“. Il va également être le chantre de la Vierge, dont il va rendre, de manière émouvante et délicate, le sentiment maternel. Il va également être un portraitiste de qualité qui va tendre à suggérer le caractère moral du personnage. Ses portraits sont d’une grande sobriété.

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Dirk Bouts (1420-1475)

Dirk Bouts (1420-1475), quant à lui, est un peintre originaire d’Harlem (Pays-Bas actuels) qui va s’établir à Louvain en 1447 et qui va y travailler jusqu’à sa mort. Il peint des personnages très dessinés aux attitudes raides dont l’expression est figée.

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Petrus Christus (1410-1473)

Comme beaucoup de ses contemporains, Petrus Christus ne va pas hésiter à faire des emprunts de forme à J. Van Eyck mais aussi à Roger Van der Weyden et Dirk Bouts. Il va toutefois innover en réservant une large place au paysage. On lui attribue une vingtaine de tableaux datés entre 1446 et 1457.

Hugo Van Der Goes (1440-1482)

Hugo Van Der Goes, autre célèbre Primitif flamand, est quant à lui originaire de Gand. C’est toutefois au monastère du Rouge Cloître, à Auderghem (commune bruxelloise) qu’il va terminer ses jours. Il est d’un naturel très tourmenté et manifeste dans son œuvre une forte personnalité.

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Hans Memling (1435-1494)

Hans Memling présente un genre fort différent de son contemporain Hugo Van Der Goes. Originaire des environs de Francfort (Allemagne), il va s’installer à Bruges où il bénéficiera du mécénat des membres de l’Hôpital St-Jean mais aussi d’autres mécènes (locaux et étrangers). Il sera l’auteur de triptyques, mais aussi de portraits ainsi que de la “châsse de Ste-Ursule“. Sa conception calme et délicate donne des œuvres précieuses faites de tonalités douces et lumineuses. Il ne cherche pas à peindre “l’âme humaine“.

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A Bruges, un musée lui est spécifiquement consacré: le Musée Memling {expo-brugge.be –icon map-maker Mariastraat 38 – B-8000 Bruges
icon website expo-brugge.be} (qui se trouve dans l’Hôpital St-Jean).

Gérard David (1460-1523)

Gérard David va être le dernier grand maître brugeois. Son esprit et sa technique demeurent fidèles aux traditions mais il va emprunter à la Renaissance certains éléments de décor. Il va accorder une grande importance aux paysages.

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Parmi les lieux où l’on peut découvrir des œuvres des Primitifs flamands, on peut citer le Musée Groeninghe {MUSEA BRUGGE –icon map-maker Dijver 12 – B-8000 Bruges –icon websiteMUSEA BRUGGE} à Bruges.

L’art de l’enluminure

L’art de l’enluminure va atteindre la perfection au 15e siècle, dans les manuscrits {Livres anciens écrits à la main} richement enluminés par Jean Van Eyck, Jean Tavernier et Loyset Liédet.

Sculpture et autres arts

La sculpture gothique

La sculpture gothique sur pierre va continuer à se développer tout au long du 15e siècle. Les compositions vont devenir de plus en plus compliquées, la construction générale de plus en plus mouvementée.

On trouvera des exemples particulièrement remarquables de sculpture sur pierre de cette époque avec les riches jubés  {Dans une église, le jubé est une tribune et une clôture de pierre ou de bois séparant le chœur liturgique de la nef} sculptés comme ceux que l’on peut voir dans la Collégiale St-Pierre à Louvain ou l’église Notre Dame à Aarschot . Un autre exemple, bien qu’un peu plus tardif est celui de la basilique St-Materne à Walcourt.

La sculpture des anciens Pays-Bas va avant tout devoir sa grande renommée à son art de travailler le bois et par conséquent à la production de retables (ornement d’architecture ou de menuiserie sculpté contre lequel est appuyé l’autel). Les principaux centres de production vont se trouver dans le Brabant (Bruxelles, Malines, Anvers) et les commandes vont affluer de partout (du nord de l’Europe, de l’Espagne de l’Italie…).

Un exemple de ceux-ci est le “retable de St-Georges” conservé aux MRAH (Musée d’Arts Royaux et d’Histoire) du Cinquantenaire de Bruxelles.

Les sculptures des stalles {Sièges disposés autour du chœur de certaines églises} vont également être souvent ornées de scènes (bibliques ou pittoresques) de haute qualité.

Un des meilleurs exemples se trouve à la Collégiale St-Pierre de Louvain.

L’art de la tapisserie

La tapisserie est un tableau ou dessin en tissu (croisement de fils) fait de fils diversement colorés (de la trame) qui s’entremêlent avec les fils d’armature non teints (de la chaîne) tendus sur le métier à tisser.

S’il s’agit de métiers à tisser verticaux, on parle de tapisserie à haute lisse (comme c’est le cas pour les tapisseries de Bruges et Tournai) et s’il s’agit de métiers horizontaux, on parle de tapisserie à basse lisse (comme c’est le cas pour les tapisseries de Bruxelles et Audenarde).

La tapisserie sert à couvrir les murs des châteaux et des églises.

Apparu en France, cet art va se développer de façon extraordinaire dans les anciens Pays-Bas au 15e siècle. Tournai prendra la tête du mouvement suivie, ensuite, par Bruxelles (16e siècle), Courtrai, Audenarde, Bruges, Malines et Anvers.

Le Musée du Cinquantenaire à Bruxelles en possède une très belle collection.

L’imprimerie {Liebrecht (H), Rency (G), Histoire illustrée de la Littérature belge de langue française, éd. Vanderlinden, 1926,p. 175-176}

Grâce à l’imprimerie, la diffusion des textes (jadis rare parce que manuscrite) va permettre aux savants de répandre leurs œuvres et de se procurer celles dont ils ont besoin.

Les premiers ouvrages imprimés en Belgique datent de 1473. Par la suite, l’imprimerie va se répandre rapidement dans les anciens Pays-Bas. Entre cette époque et la fin du 15e, on compte 10 à 20 ateliers, répartis dans 7 villes. Louvain, la ville universitaire, sera avant Anvers le grand centre de la typographie et c’est à Bruges que le premier livre connu en anglais sera publié. Bruxelles ne possède, au 15e siècle qu’un atelier.

Littérature

Les Ducs de Bourgogne seront des mécènes qui non seulement achèteront des livres et feront confectionner des manuscrits (se constituant ainsi une magnifique bibliothèque) mais soutiendront également les écrivains.

On retiendra, en particulier, l’œuvre des grands chroniqueurs {Il s’agit, en quelque sorte des historiens et journalistes de l’époque} bourguignons qui vont écrire et décrire les fastes du règne des Ducs de Bourgogne.

Parmi les plus importants originaires des Pays-Bas bourguignons, on peut citer les noms de Georges Chastellain (1415-1475), natif d’Alost, qui sera un des premiers prosateurs {Auteur qui écrit en prose et non plus en vers. Le langage parlé est de la prose} de son temps et Philippe de Comynes (1447-1511), bourgeois flamand anobli qui va quitter la Cour du Duc de Bourgogne, Charles Le Téméraire, pour passer au service du Roi de France, Louis XI.

Musique

Au cours du 15e siècle, la “polyphonie à contrepoint” va connaître un brillant essor avec des œuvres religieuses (messes, motets {Pièces vocales religieuses}) mais aussi profanes (ballades {Chansons}, rondeaux {Airs où le thème principal est repris plusieurs fois}…). Parmi les compositeurs de cette époque, on peut retenir les noms de Guillaume Dufay (1400-1474) né à Chimay, de Gilles Binchois (1400-1460) né à Mons, de Jean Ockeghem (+/- 1430-1495) né à Termonde et du maître hennuyer Josquin des Prés (+/- 1450-1521). Tous vont contribuer à rehausser le faste des cérémonies de la Cour bourguignonne.

Les 16e siècle (les Pays-Bas espagnols)

Introduction

Une époque dominée par un conflit politico-religieux

Au 16e siècle, l’apparition de la Réforme protestante {La Réforme protestante est le nom donné à la remise en cause des croyances et des pratiques de l’Église catholique romaine par de nombreux théologiens. Cette contestation a conduit à une scission de l’Église catholique romaine et à la formation des Églises protestantes} et l’instauration de l’Inquisition vont avoir des conséquences très importantes pour les Provinces des anciens Pays-Bas.

Les tribunaux (religieux) de l’Inquisition vont condamner tout hérétique à mort. Les premières victimes vont être brûlées sur la Grand-Place de Bruxelles en 1523.

Par ailleurs, sous le règne de Philippe II (1555-1598), le conflit politico-religieux qui va déchirer les anciens Pays-Bas pendant plusieurs années va aboutir à la scission de ceux-ci, les 7 provinces du nord, à majorité protestantes, devenant indépendantes en 1581 et les Pays-Bas du Sud, majoritairement catholiques, restant une possession des Habsbourg.

Ce conflit va provoquer l’exil de nombreux habitants parmi lesquels d’importants commerçants et intellectuels emmenant avec eux leurs connaissances et leur fortune.

Le développement de l’Humanisme

Le 16e siècle va être le siècle du développement de l’Humanisme, courant culturel européen trouvant ses origines en Italie. Renouant avec la civilisation gréco-latine, les intellectuels de l’époque vont manifester un vif appétit de savoir (philologie notamment). Estimant que l’Homme est en possession de capacités intellectuelles potentiellement illimitées, ils considèrent la quête du savoir et la maîtrise des diverses disciplines comme nécessaires au bon usage de ces facultés. Ils prônent la vulgarisation de tous les savoirs, dont le savoir religieux.

Érasme de Rotterdam (1469-1536), originaire des actuels Pays-Bas, est considéré comme l’une des figures majeures de l’Humanisme. Il va exercer une influence énorme sur les intellectuels de son temps de même que sur les suivants. Il séjournera, en 1521, pendant 6 mois à Anderlecht (commune bruxelloise) où l’on peut encore visiter sa maison.

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Dans la seconde moitié du 16e siècle, Juste Lipse (1547-1606) va incarner, dans les Pays-Bas du Sud, la seconde génération d’humanistes. Philologue et philosophe, Juste Lipse édite des textes anciens, les commente, les éclaire par ses traités d’antiquité romaine ou de prononciation latine, quand il ne transpose pas les leçons de la “sagesse antique” dans ses livres de sciences morales et politiques. Par là, l’œuvre de Juste Lipse va avoir une longue et profonde influence. On compte plus de 80 éditions de certains de ses traités comme celui sur “La Politique{Liebrecht (H), Rency (G), Histoire illustrée de la Littérature belge de langue française, éd. Vanderlinden, 1926, p.177}.

Il va être en relation avec toute l’Europe savante et va enseigner à l’Université de Louvain.

Architecture

Le 15e siècle, en Italie, et le 16e siècle, en France, vont être marqués par la naissance du style renaissant. En architecture, ce style se caractérise, notamment, par l’horizontalité des édifices (contrairement à la verticalité des constructions gothiques) et la réapparition d’éléments décoratifs gréco-romains (colonnes et pilastres {Membres verticalux formés par une faible saillie d’un mur, en général munis d’une base et d’un chapiteau. Colonnes carrées insérées dans une construction et faisant saillie} divisent l’édifice en étages).

L’entrée de l’architecture de la Renaissance dans les Pays-Bas du Sud va être assez longtemps retardée du fait du succès constant du style gothique mais aussi du fait du contexte politico-religieux de l’époque.

On verra donc, au cours du 16e siècle, la poursuite de constructions en style gothique.

C’est par exemple de cette époque que datent la tour de la cathédrale Notre Dame d’Anvers, l’aile droite de l’Hôtel de Ville de Gand ou encore l’Hôtel de Ville d’Audenarde.

Ceci ne va cependant pas empêcher le style italien de “s’infiltrer” progressivement à partir du début du 16e siècle par l’intermédiaire de la Renaissance française.

L’aile du Palais de la gouvernante Marguerite d’Autriche (actuel palais de Justice) va être édifiée dans ce style en 1517 à Malines, ville où l’on trouve également la Maison du saumon” dont la construction a débuté en 1530, dans le style renaissant également. Les deux cours intérieures (1526-1533) du Palais des Princes-Evêques de Liège illustrent également le style renaissant.

L’influence de la Renaissance à Bruges, quant à elle, s’explique par les nombreuses relations commerciales que ce port entretenait depuis longtemps avec l’Italie (Florence, Venise, Gênes, Naples).

C’est dans ce style que l’on construira le “greffe du Franc de Bruges (1535) que l’on peut encore admirer sur la place du Burg à Bruges.

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Toutefois, de façon générale, si certains éléments architecturaux vont devenir progressivement renaissants, la structure générale des bâtiments va avoir tendance, pendant longtemps, à rester gothique, se caractérisant d’avantage par une verticalité gothique qu’une horizontalité renaissante.

L’importation directe du style renaissant va avoir lieu après 1550 sous l’impulsion de l’éditeur anversois Pierre Coecke Van Aelst grâce à ses ouvrages théoriques sur les traités d’architecture de Serlio, Vignole, Palladio et Vitruve, architectes italiens.

C’est à Cornelis Floris de Vriendt (1514-1575) que l’on doit le chef-d’œuvre de la Renaissance flamande, à savoir l’Hôtel de Ville d’Anvers (1561-1565), qui réalise un compromis harmonieux entre la Renaissance italienne et la prédilection flamande pour la décoration ornementale surabondante. Ainsi si, de façon générale, cet Hôtel de Ville ressemble aux palais renaissants italiens, on voit cependant au centre du bâtiment un avant-corps vertical (rappel de la tour des Hôtels de Ville du passé) avec un décor luxuriant.

L’architecture de l’Hôtel de ville d’Anvers va servir d’inspiration aux architectes de l’aile gauche de l’Hôtel de Ville de Gand (1595-1618) et de l’Hôtel de Ville de Furnes (1596-1612).

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Peinture

C’est Anvers qui va être le centre artistique renaissant.

Quelques noms

Le fondateur de l’Ecole anversoise est Quentin Metsys (+/- 1466-1530). Il va apporter une modification importante dans l’art de son époque. Son style va se faire plus ample et plus large (par rapport au style qui prédominait dans le passé.

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Jean Gossart, dit Mabuse (+/- 1470-1533) est le premier, quant à lui, à aborder des sujets mythologiques.

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Parmi les paysagistes, c’est Joachim Patenier (1480-1524) qui prédomine.

Pierre Brueghel, le maître incontesté

Le maître incontesté de cette époque est Pierre Brueghel {Ce qui suit est pour partie extrait de: Claessens (B), Rousseau (J), Notre Bruegel, éd. Fonds Mercator, Anvers, 1969} (+/- 1525-1569), dit aussi Brueghel l’Ancien {Pour le distinguer de l’un de ses fils, Pierre Brueghel le Jeune}, peintre qui inscrit pleinement son œuvre dans la vie et les événements de son temps (le conflit politico-religieux qui va déchirer les anciens Pays-Bas et le développement de l’Humanisme).

Il est, à l’origine, surtout un paysagiste (la nature est pour lui la source de toute beauté. Ce n’est qu’à partir de 1556 qu’il va prendre l’Homme comme objet d’étude.

Dans ses tableaux dominés par la vie populaire, il montre des paysans tels qu’ils sont dans leurs activités et divertissements. Même les scènes bibliques de Brueghel sont transposées selon la réalité de son époque (les vêtements, l’architecture… sont ceux du 16e siècle) et se situent pour la plupart dans un village. Par ailleurs, souvent, la description de la place publique qui fourmille de monde prend plus de place que le thème lui-même (comme le “Dénombrement de Bethléem” {Qui illustre un récit tiré de la Bible: l’Empereur romain Auguste a exigé le recensement de la population en vue du paiement des impôts. On raconte, dans la bible, que Joseph et Marie (sur un âne) qui était enceinte du futur Jésus, se rendirent à Bethléem pour ce grand recensement et que c’est là qu’elle donna naissance à son fils} où Marie et Joseph sont perdus au milieu d’un village du Brabant animé par les travaux et les jeux de l’hiver). Au 16e siècle, en effet, la rue et la place étaient des lieux de rendez-vous et de divertissements: jeux d’hiver, carnaval, procession et kermesse, danses ou rites campagnards, tout était prétexte aux réjouissances et le peintre a su raconter ces rassemblements. Il se sent proche des paysans, eux qui savent accoucher la terre. Dans la série “Les Mois”, il montre l’union profonde des êtres vivants soumis aux cycles naturels.

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L’Homme apparaît, chez Brueghel, comme quelqu’un dépendant d’un corps à corps avec la nature, la tradition, les croyances, superstitions et autres grandes forces obscures qui le mènent (comme les contraintes de la société et de son milieu). Il ne sépare jamais l’Homme de la foule de ses semblables. Il l’étudie dans ses rapports avec eux. Moralisateur et satirique, il raille la folie des Hommes.

Humaniste et fin lettré, il ne va pas cesser de regarder vivre les Hommes qui l’entourent. Il les voit comme ils sont, avec leurs défauts, leur laideur, leurs malheurs, leur rudesse, leur courage, leur révolte, leur patience. Il les voit peiner, mendier mais aussi boire, danser, profiter des instants d’abondance…

Lorsqu’il traite de questions liées aux vices et aux vertus, il n’en donne pas une représentation ou une lecture théologique mais les aborde, au contraire, dans leurs effets pratiques au niveau de la vie quotidienne.

Sa peinture s’élève par l’esprit, comme par le métier, bien au-delà de l’anecdote folklorique. Plaidant la tolérance et dénonçant l’oppression, certaines de ses œuvres vont stigmatiser les persécutions religieuses et l’application de la justice de son époque et ce, de façon détournée. Il ne va, en effet, jamais représenter l’incident, le drame en tant que tel mais va s’y référer de manière allusive. Ainsi, dans un tableau comme “Le Triomphe de la mort“, Brueghel adjoint aux effets de la mort naturelle, les massacres collectifs, les décapitations, les gibets… Dans “Pie sur le gibet“, lançant un ultime défi aux persécuteurs, il montre des gibets désaffectés et le retour de la vie. Dans son tableau “Le massacres des innocents”, on reconnaît le portrait du terrible Duc d’Albe. Dans le dessin qu’il consacre aux effets pratiques de la justice (tortures, exécutions…), il stigmatise chacune des façons affreuses dont elle est appliquée aux Hommes.

On peut admirer certaines de ses œuvres {Sont répertoriés aujourd’hui une cinquantaine de tableaux comme étant de sa main, dont le tiers se trouve au Kunsthistorisches Museum de Vienne} au Musée d’Art Ancien {Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique –icon map-maker Rue de la Régence 3 – B-1000 Bruxelles –icon website Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique} (MRBA) à Bruxelles.

Sculpture et autres arts

La sculpture

Parmi les sculpteurs qui vont marquer cette époque, on peut citer Jean Mone (1485-1550) qui sera sans doute le meilleur interprète du style renaissant dans les Pays-Bas du Sud, notamment dans les monuments funéraires en albâtre qu’il va réaliser et dont on peut voir un exemple dans l’église de Braine-le-Château (le mausolée de Maximilien de Hornes 1542). On peut également voir sa seule œuvre datée et signée, le “retable de St-Martin“, dans l’église Notre-Dame de Hal (1533).

Jacques Dubrœucq (1500-1584) est, quant à lui, l’auteur du jubé de la Collégiale Ste-Waudru à Mons.

Enfin, Cornelis Floris de Vriendt (1514-1575) ne sera pas uniquement l’architecte de l’Hôtel de Ville de l’Anvers. Il sera également l’auteur, notamment, du jubé de la cathédrale de Tournai (1573).

La tapisserie

L’art de la tapisserie va continuer à se développer jusqu’en 1550, époque à partir de laquelle les conflits politico-religieux vont pousser de nombreux artisans à s’établir dans d’autres pays d’Europe, provoquant ainsi une période de décadence.

Bernard Van Orley (1492-1542) va exceller dans le dessin de cartons pour tapisserie.

Le Musée du Cinquantenaire, à Bruxelles, en possède une très belle collection.

L’imprimerie

Anvers est un des centres producteurs de livres les plus importants en Europe. Commencée au 15e siècle, l’importance de l’imprimerie anversoise ne va cesser de croître au 16e et 17e siècle.

Souvent, les imprimeurs vont être des savants autant que des artistes. Ils vont être en relation avec nombre d’intellectuels et d’artistes de leur temps. L’imprimerie va donc jouer un rôle essentiel dans la diffusion des idées et des œuvres.

Le Musée Plantin-Moretus {Museum Plantin-Moretus –icon map-maker Vrijdagmarkt 22 – B-2000 Antwerpen –icon website museumplantinmoretus.be/} à Anvers permet de découvrir l’atelier d’une des imprimeries les plus renommées de l’époque. On y découvre les plus anciennes presses d’imprimerie du monde et une collection de quelque 30 000 imprimés.

Sciences

Avec la propagation de “l’Humanisme“, l’être humain va devenir le centre de toutes les attentions. Les sciences vont s’engager dans la voie de l’observation et de l’expérimentation.

André Vésale (1514-1564)

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Parmi les personnalités les plus marquantes de cette époque, on peut pointer André Vésale, médecin bruxellois qui est généralement considéré comme un des plus grands anatomistes {anatomie: description de la structure du corps humain, de ses organes et de leur position} de l’histoire de la médecine.

Rembert Dodoens (1517-1585)

On peut également citer Rembert Dodoens, botaniste et médecin originaire de Malines qui travaillera à la Cour de Vienne avant d’obtenir une chaire de médecine à l’Université de Leyde (dans les actuels Pays-Bas). Son intérêt pour la botanique sera d’abord d’ordre médical. Il est l’auteur de nombreuses publications.

Mercator (1512-1594)

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Mercator, mathématicien et géographe flamand, va travailler, quant à lui, notamment, à l’élaboration d’une projection de la Terre (“La projection de Mercator“). Celle-ci va représenter un progrès en terme de description des contours des terres, information importante notamment pour les navigateurs. Il va connaître des démêlés avec les autorités ecclésiastiques qui le soupçonnent d’hérésie. Ainsi en 1533, il va devoir quitter Louvain pour éviter une enquête sur ses croyances personnelles et, dix ans plus tard, il va être arrêté pour hérésie à Anvers mais va réussir à “se tirer de ce mauvais pas”.

Abraham Ortelius (1524-1598), né à Anvers, sera également un des fondateurs de la cartographie.

Simon Stévin (1548-1620)

On peut également citer le nom de Simon Stévin, mathématicien, physicien et ingénieur né à Bruges. Il fonda la science de l’hydrostatique (science des liquides) en montrant que la force exercée par un liquide sur une surface dépend de la hauteur du liquide et de l’aire de la surface. Auteur de 11 livres, Stévin apporta des contributions significatives à la trigonométrie, à la géographie, aux fortifications et à la navigation. Dans “Wereldschrift”, il défendit le système héliocentrique de Copernic. Inspiré par Archimède, Stévin écrivit des ouvrages importants en mécanique. En 1585, il publia “Theinde” dans laquelle il présenta un traité élémentaire et complet des fractions décimales. Bien qu’il n’en fut point l’inventeur (elles avaient été utilisées par les Arabes et les Chinois longtemps avant l’époque de Stévin), il introduisit leur usage en mathématiques.

Musique

La “polyphonie à contrepoint” continue de connaître un brillant essor au 16e siècle.

Par ailleurs, le compositeur qui va marquer cette époque est Roland de Lassus (1537-1594), né à Mons. Il a laissé environ 200 motets; des messes; des litanies; des leçons; des psaumes de pénitence; des requiem; des lamentations; des offices; des magnificat; des hymnes; des chansons (françaises, madrigaux italiens, chansons allemandes). Les dédicaces de ses œuvres montrent ses relations avec les cours du Wurtemberg, de Bade, de Styrie, du Tyrol, de Silésie et de Brunswick, ou avec certains princes italiens. Il va avoir de nombreux élèves {Roland de Lassus}.

Le 17e siècle (les Pays-Bas espagnols suite)

Introduction

Au 17e siècle, au nom de l’orthodoxie, une étroite censure va peser sur les activités intellectuelles. Les arts en revanche, vont jouir de plus de liberté.

Durant le règne des Archiducs Albert et Isabelle (1598-1621), la paix va être rétablie et l’économie développée. Ces souverains vont installer leur Cour à Bruxelles et s’entourer d’artistes.

C’est au cours de cette période que l’on va voir éclore l’art baroque dans les Pays-Bas du Sud. Cet art, annoncé par Michel Ange au 16e siècle en Italie, va atteindre son apogée au 17e siècle. Exubérant, tourmenté, surchargé, il symbolise à la fois l’esprit de la “Contre Réforme{La Contre-Réforme est le mouvement par lequel l’Église catholique romaine réagit, dans le courant du 16e siècle, face à la Réforme protestante} dans les pays catholiques et le goût fastueux des souverains absolus. Il va donner une nouvelle impulsion à l’art sacré. Ce style, qui est l’expression exubérante du renouveau catholique, va se caractériser notamment par ses lignes courbes et son opulence. La décoration est riche et abondante. Les détails sont traités avec minutie. L’Eglise (catholique) veut célébrer les offices religieux avec toujours plus d’éclat et accentuer l’opposition à l’égard de la Réforme protestante. Elle va notamment privilégier des scènes de martyrs et d’extase {Collectif, Le siècle de Rubens, MRBA, Bruxelles, 1965, p. XLI}.

La mort d’Albert, en 1621, va mettre fin à cette période d’essor et de calme. A dater de cette époque, les anciens Pays-Bas du Sud ne seront plus qu’un État satellite d’un empire plus vaste dirigé depuis l’Espagne par les Habsbourg.

Entre 1621 et 1713, ils vont devenir le champ de bataille de l’Europe. Cette période va être une période de misère presque générale.

Architecture

Le 17e siècle va constituer l’apogée de l’art baroque, style né en Italie à la fin du 16e et qui s’est progressivement étendu à d’autres pays européens catholiques.

Parmi les caractéristiques architecturales de ce style, on peut citer l’usage, comme à l’époque romane, de l’arc en plein cintre {Arc formant un demi-cercle}, l’application et la superposition des ordres classiques antiques {Les ordres, en architecture, déterminent les proportions et l’ornementation de l’architecture (en particulier des colonnes). Les grecs n’en reconnaissaient que trois: l’ordre dorique, l’ordre ionique et l’ordre corinthien, les romains en ont ajouté deux: l’ordre toscan et l’ordre composite}, l’utilisation du plan basilical (ou central) et une ornementation chargée.

Les artistes des Pays-Bas du Sud vont visiter l’Italie et s’inspirer des productions de ses grands architectes (Bramante, Michel-Ange…). Ils prennent pour modèles la basilique St-Pierre de Rome et surtout l’église du Gesu, à Rome également. Revenus, ils vont propager les idées nouvelles qu’ils ont découvertes durant leur voyage mais aussi les transformer, les adapter suivant leur vision personnelle et leur tempérament.

Plusieurs centaines d’édifices religieux vont être construits en style baroque, durant cette période.

Parmi les grands architectes baroques de cette époque, dans les Pays-Bas du Sud, différents noms s’imposent.

  • Wenceslas Cobergher (1560-1634), architecte, peintre et ingénieur, va être l’auteur du premier bâtiment en style baroque dans ces régions. Il s’agit de la basilique Notre Dame de Montaigu (Scherpenheuvel), ville du Brabant flamand (1609). Il va également être l’architecte de l’Église des Augustins à Anvers (1615).
  • Jacques Francart (1583-1652), architecte, peintre, dessinateur, ingénieur militaire, va être notamment l’auteur de l’Église du Grand Béguinage de Malines (1629-1647).
  • Pierre Huyssens (1577-1637), frère de l’ordre religieux des Jésuites {Ordre qui va soutenir le développement du baroque}, sera, quant à lui, un des 2 architectes de l’église St-Charles Borromée à Anvers (1615-1621), église dont la tour est considérée comme le plus beau campanile baroque de Belgique. Il construira également l’église Ste-Walburge à Bruges, l’église St-Loup de Namur et l’église Notre-Dame de l’abbaye St-Pierre à Gand, seule église baroque de la ville. Il ne la verra jamais achevée, étant mort avant la fin des travaux.
  • Guillaume Hesius ou Van Hees (1601-1690) est l’auteur de l’église St-Michel à Louvain (1650-1666)
  • Luc Faidherbe (1617-1697) est, quant à lui, avant tout un sculpteur avant d’être un architecte. Il a été l’élève de Rubens dont il va subir l’influence. On lui doit notamment l’église Notre Dame de Hanswijk et la chapelle de Leliendael à Malines, ainsi que (probablement) l’église Notre Dame des Riches Claires à Bruxelles.

Comme autres exemples d’édifices religieux de style baroque, on peut notamment citer, pour Bruxelles, l’église St-Jean-Baptiste du Béguinage, l’église des Brigittines et l’église Notre-Dame du Bon secours.

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Quant à l’architecture baroque “civile”, elle fut nettement moins pratiquée dans les Pays-Bas du Sud. Toutefois, de beaux exemples de réalisations demeurent.

Parmi ceux-ci, on peut citer la maison du peintre Rubens à Anvers, bel exemple de demeure privée du 17e siècle, celle du peintre Jordaens, à Anvers également, la maison de La Bellone à Bruxelles (46, rue de Flandre) et enfin, l’ensemble des maisons se trouvant tout autour de la Grand Place de Bruxelles.

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Il ne faut, en effet, pas oublier qu’en 1695, Bruxelles va être la proie d’un terrible bombardement par les troupes françaises. A cette occasion, 3850 maisons vont être détruites, parmi lesquelles celles qui bordaient la Grand-Place. Leur reconstruction va être l’occasion, pour les corporations {Les corporations regroupaient les artisans d’une même profession. Elles étaient très hiérarchisées avec les apprentis, les compagnons, les maîtres ou patrons parmi lesquels étaient choisis les chefs de la corporation} qui en étaient propriétaires, d’étaler leur richesse.

Peinture

Pierre Paul Rubens (1577-1640)

La figure majeure de la peinture de cette époque est Pierre Paul Rubens. Après un long séjour en Italie et la découverte des maîtres italiens, il va rapidement se retrouver à la tête de la vie artistique des Pays-Bas du Sud, vie qui va être concentrée plus particulièrement à Anvers.

De façon générale, il va concilier tous ses emprunts faits à l’étranger avec la sensibilité de la tradition picturale flamande. Ainsi, parmi les caractéristiques de son style, on peut citer un attachement profond au rendu de la matérialité des objets représentés (que ce soit un morceau de tissu ou même la chair d’un corps humain), un coloris riche et chaud, ainsi qu’une conviction religieuse inébranlable (caractéristiques qui le situent dans le sillage des Primitifs flamands) auxquels va s’ajouter une grande sensualité. Par ailleurs, il organisera fréquemment ses compositions selon un axe en diagonale, caractéristique typique du baroque. Sa peinture est souvent une peinture de mouvement.

Bénéficiant notamment de la “protection” des Archiducs Albert et Isabelle et autres “grands“, il va recevoir un nombre invraisemblable de commandes, dont plusieurs d’énorme envergure. Il va pouvoir y répondre grâce à la collaboration de quelques jeunes artistes de talent (comme A. Van Dijck) qui vont travailler dans son atelier.

Ses œuvres religieuses vont être considérées comme les plus exemplaires de la Contre-Réforme.

Rubens

On peut voir ses œuvres notamment dans la cathédrale d’Anvers ainsi qu’au Musée d’Art Ancien {Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique –icon map-maker Rue de la Régence 3, B-1000 Bruxelles –icon website Musées royaux des Beaux-Arts de Belgique} de Bruxelles.

Antoine Van Dijck (1599-1641)

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Ancien collaborateur de Rubens, Antoine Van Dijck va devenir, quant à lui, un maître de l’art du portait. Il va exercer son talent dans différentes villes italiennes puis en Angleterre où il réalisera en l’espace de 10 ans plus de 350 portraits parmi lesquels ceux de membres de la Cour et 38 du Roi Charles Ier d’Angleterre. Ses tons sont généralement doux et nuancés, le rendu des étoffes et des matières est délicat et les attitudes sont vives et gracieuses. Il va avoir une grande influence sur l’art du portrait en Europe, et en Angleterre en particulier.

Jacques Jordaens (1593-1678)

Un autre nom fréquemment cité lorsqu’il s’agit de traiter de la peinture du 17e dans les Pays-Bas du Sud est celui de Jacques Jordaens, peintre tout à fait caractéristique de l’art baroque de par la richesse des couleurs et la surcharge de ses représentations (qu’il va pousser beaucoup plus loin que Rubens). Il est souvent considéré comme un suiveur de Rubens et va faire, en pratique, des œuvres de qualité fort inégales. Par ailleurs, il va avoir tendance à répéter machinalement ses compositions lorsque celles-ci ont du succès. C’est ainsi, par exemple, qu’il va peindre 15 exemplaires de son tableau “Le Roi boit” (Musée d’Art Ancien de Bruxelles), tableau montrant un paysan représenté devant une “galette des Rois”. Jordaens appartient à une veine “populaire” du baroque.

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Sculpture

La sculpture va être prospère en cette époque d’intenses constructions d’églises. Les supports choisis seront, de préférence, la pierre naturelle, le marbre et le bois {Pour les stalles, les confessionaux, les jubés…}.

De façon générale, on peut dire que le style est “rubénien“. Les personnages représentés sont musclés et bien en chair, ils ont des gestes “vivants”, le décor est riche. Certains de ces sculpteurs vont d’ailleurs recevoir leur formation dans l’atelier même de Rubens, comme Luc Faidherbe (1617-1697), par exemple.

Mais, ce qui va être le plus frappant à cette époque, c’est l’existence de véritables dynasties d’artistes, comme les Duquesnoy. Le plus illustre de ceux-ci sera François Duquesnoy (1597-1643) qui va être considéré comme la figure de proue du baroque dans les anciens Pays-Bas du Sud. Sa carrière va, cependant, presque entièrement se dérouler à Rome. Ses œuvres vont être imitées dans les anciens Pays-Bas mais aussi en France et en Italie.

Il est le fils de Jérôme Duquesnoy l’Ancien (+/- 1570-1641/42 ?), auteur de la statuette du célèbre Manneken Pis que l’on peut voir à Bruxelles, près de la Grand-Place.

Une autre dynastie de sculpteurs sera celle des Quellin dont le principal représentant sera Artus Quellin l’Ancien (1609-1668).

A Liège, Jean Delcour (1631-1707), qui a été le collaborateur du célèbre sculpteur italien Bernini (Le Bernin), va sculpter d’élégantes œuvres pleines de tendresse et de raffinement, comme la Fontaine Notre-Dame (rue Vinâve d’Ile) à Liège, ville qui renferme la plus grande partie des œuvres connues de Jean Delcour.

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Sciences

On retiendra le nom de Jean-Baptiste Van Helmont (1577-1644), chimiste, physiologiste et médecin, né à Bruxelles, qui découvrira notamment le gaz carbonique et le rôle du suc gastrique dans la digestion.

Le 18e siècle (les Pays-Bas autrichiens) {Sauf mention contraire, ce qui suit est pour l’essentiel extrait de Heyblom (J), Notes d’Histoire de Belgique, éd. Les Amis de l’IPIAT et de Heyblom (J), Histoire de l’Art II, éd. Les Amis de l’IPIAT}

Architecture

Le 18e siècle sera marqué par l’apparition des styles rocaille (ou Louis XV) et néoclassique (ou Louis XVI) nés en France.

Le style rocaille

En architecture, le style rocaille se caractérise notamment par des lignes sinueuses et l’usage de coquillages comme éléments décoratifs. Il va apparaître dans les Pays-Bas du Sud à partir de la seconde moitié du 18e siècle.

C’est la ville d’Anvers qui va être séduite la première. L’architecte Jean-Pierre Van Baurscheit le Jeune (1699-1768) va y réaliser différents bâtiments dans ce style.

Le plus connu est l’Hôtel Osterrieth dont la façade donne sur le Meir, grande artère anversoise. Van Baurscheit va également être l’architecte de l’Hôtel de Ville de Lier.

On trouve également différents exemples d’architecture rocaille à Gand parmi lesquels l’Académie Royale flamande, de David ‘t Kindt et l’Hôtel Faligan, œuvre de B. De Wilde.

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Les Hôtels de Ville de Huy et de Spa montrent, quant à eux, un style Louis XV adopté avec retenue.

Le style néo-classique

Ce style tend vers un retour intentionnel des conceptions et des formes des périodes classiques de l’antiquité grecque et romaine. Les caractéristiques de ce style sont la simplicité des lignes, le triomphe de la ligne droite, de la symétrie et des formes géométriques. La décoration sculptée est toujours sobre. En général, les toitures sont invisibles.

C’est vers 1770 que ce style va commencer à se développer dans les Pays-Bas du Sud. Son plein épanouissement correspondra à la période du gouvernement de Charles de Lorraine, beau-frère de l’Impératrice Marie-Thérèse qui en sera le gouverneur général jusqu’à sa mort.

Les œuvres de cette époque se trouvent principalement à Bruxelles et se concentrent pour l’essentiel dans le quartier du Parc Royal. Il s’agit du Palais de la Nation (le Parlement), des bâtiments entourant le Parc Royal, des bâtiments entourant la Place Royale ainsi que l’aile droite du Palais de Nassau (à côté du Mont des Arts). Par ailleurs, outre la Place Royale, Bruxelles compte une autre place néo-classique: la place des Martyrs, située dans le bas de la ville.

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Sculpture et autres arts

La sculpture

Parmi les sculpteurs de cette époque, on peut retenir le nom de Laurent Delvaux (1696-1778) qui est l’auteur de la “chaire de vérité{Espèce de tribune à baldaquin d’où le prêtre adresse la parole aux assistants} se trouvant dans la cathédrale St-Bavon à Gand, ainsi que celles de Ste-Gertrude à Nivelles.

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Par ailleurs, le sculpteur néo-classique par excellence en Belgique va être Gilles Lambert Godecharles (1750-1835). Cet ancien élève de L. Delvaux va décorer, en 1781, le fronton du Palais de la Nation (le Parlement) à Bruxelles. Il sera également l’auteur des bas-reliefs allégoriques de l’actuel château royal de Laeken, ainsi que de nombreux bustes.

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La tapisserie

La tapisserie va se maintenir péniblement jusqu’en 1794, date de la fermeture, à Bruxelles, du dernier atelier.

Musique

André-Modeste Grétry (1742-1813), compositeur liégeois va particulièrement marquer cette époque. Ses opéras ou opéras-comiques connaîtront, à quelques exceptions près, un franc succès. Il sera, sans doute, le compositeur le plus adulé de l’époque pré-révolutionnaire en France (pays où il a décidé de s’établir) et laissera un nombre d’œuvres considérables parmi lesquelles plus de cinquante opéras, des romances, des hymnes et chants révolutionnaires, peu de musique instrumentale (un concerto pour flûte, six quatuors à cordes, une symphonie pour quatuor à cordes et deux cors).

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